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Réflexions - Page 2

  • Projet K

    Hors de soi toute la violence du monde, toute la haine rechargée au creux des mains. Hors de soi l'impossible accomplissement du chemin. Hors de ma tête le désespoir ! Face contre terre dans l'aliénation du cri. Il y a de multiples choses que la raison ne peut concevoir, il y a des puzzles qui ne se finissent jamais. Hors de ma tête la marée noire, le hurlement des mouettes. L'ouverture du soleil dans la toile plissée du ciel annonce le naufrage des synapses. C'est qu'il y a encore ce mur d'eau. Cette envie de se frapper la tête. Tous les matins du monde se sont donné rendez-vous. L'heure du poème impossible a sonné. Il est temps de partir sur les routes, de traverser la nuit. Hors de moi les étoiles. Mon corps exténué sur la piste. Ma pensée s'enflamme. Trop de choses incompréhensibles. Hors de soi toute la violence du cœur, t'étouffement, la rumeur. Hors de nous les villes. Les bombardements. L'œil est plus affûté que la lame. Le regard déchire la peau. Le rêve comme une pierre de lune à la surface de l'eau. Royaume minéral à la croisée des chemins. Il y aurait bien d'autres choses à dire que le poème. Mais quoi du sentiment ? Mais quoi de la possibilité de la vie, de la quête ? On m'a dit d'écrire le poème. On m'a dit de réaliser l'expérience. Et quoi de moi ? Cette douleur. Vers où ? L'impossibilité de la vie au sein des mots. Le non-sens de la rime, celui du poème revient à s'érafler les doigts. Hors de soi le sang sur la pierre comme un hippocampe qui fume un dernier cigare avant de s'enfoncer dans la nuit. Hors de soi la brisure de lame. Le métal réalise sa besogne. La voiture explose. Hors du poème. Ici et ailleurs. Le silence du cri retentissant. La peine. Première page dans les journaux. Premières pensées du matin. Premières gorgées de café. Les gamins dans la bagnole. Les étudiants dans leur train. La statue du Général est sur la place. Les voitures tournent autour. Je n'ai pas besoin de pénicilline. Je n'ai pas la grippe. Je dis qu'il y a quelqu'un dehors au milieu du jardin de la mairie. Je dis que j'attends la pierre qui me ramènera au fond. Je dis hors de moi toute la violence du monde. Hors de moi la guerre. J'ai mal à la jonction de mes neurones. Ca saigne. Je dis que ça saigne dans mes neurones. Je dis que j'attends la dernière ligne parce qu'ici ça s'infiltre dans les mots. Les mots bientôt n'auront plus de place. Je dis qu'il n'y aura bientôt plus de place pour les mots. Je dis qu'il faut effacer le programme parce que le programme est notre propre ennemi. La machine entretient toujours le même programme. Il s'autogénère, s'autoalimente. Il est impossible de trouver une alimentation en dehors de la machine. La machine vit et respire dans mes mots. Mes phrases sont les articulations de la machine. N'allez pas effectuer une mauvaise opération susceptible de perturber et d'effacer le disque dur. Gare aux fils dénudés, aux surtensions ! Attendu que je devrais m'éteindre dans pas longtemps. Ceci n'est que la lumière hors de moi. Ce n'est que la respiration de votre ordinateur. L'ordinateur est un réseau connecté à travers le monde. Il vit, respire et s'alimente par ses propres moyens. Ceci n'est qu'un des effets multiples du programme. Hors de soi toute la violence du monde dans les ordinateurs. Je dis qu'il faut aller hors de soi et des ordinateurs. Hors de moi la fin du monde et des ordinateurs. Le programme est voué à sa propre destruction. Le programme a été créé dans les tous premiers temps du monde, il est normal que sa fin soit proche, dans la mesure où le courant sera coupé pendant la nuit, hors du contrôle de la raison, hors des réseaux et des connexions. Hors du monde.

  • Spleen VI

    Je crois avoir trouvé ma vocation. Je vais faire figurant dans les séries américaines. Y a un paquet de fric à se faire. Au moins cinquante morts par jour dans les feuilletons, des meurtres, des crimes crapuleux, on en bouffe à gogo. Ben oui, des assassinats, il y en a tous les jours dans les cerveaux des scénaristes. On en devient obèse ! Que voulez-vous, c'est comme ça, l'humain c'est pas très joli à voir. Une chose est sûre, on est là et bien là. On se réveille le matin, on est là. On s'endort le soir, le lendemain matin on sera là et re-là. J'ai bien cherché un moyen pour pas être là, je me suis cassé les dents. Il y a toujours moyen de défoncer la porte, mais qui nous dit que derrière on ne sera pas là et re-là ? Pour les gens heureux, il n'y a pas de problème, ça coule dans la rivière, m'enfin quand même ! Quand ça cogne dans la tête, là quand ça fait mal, t'as l'impression que tu ne sortiras jamais de ces murs, tu ressasses tes questions dans tous les sens en essayant de trouver une issue. « Passage interdit », « cul-de-sac », la vache je suis perdu, dans la m... jusqu'au cou. Ca arrive à des gens, ça, tous les jours ! Faut pas croire que la vie est un long fleuve tranquille. Crois-moi, j'ai pas la solution. Je sais pas comment on ouvre des portes avec un biberon, comment on fait entrer un éléphant dans une boite d'allumettes ou pourquoi la mer est mouillée même quand il fait chaud en hiver. Il va falloir inventer des systèmes qui n'existent pas encore ! Et je vois la longue affluence de ceux qui se sont cassé la gueule, qui n'ont pas trouvé la solution au problème. Trouver la force de surmonter les épreuves. Facile à dire, ça ! Encore une idée de gens heureux, de qui n'ont pas le cerveau fêlé comme de la confiture ! Parce que moi ça cogne au niveau du sang dans la poitrine, ça s'agite dans tous les sens dans les neurones, c'est le feu d'artifice dans la tête. L'ambulance file à toute allure, j'ai la gueule dans le pâté, je cherche un moyen de ne pas dégueuler à côté de la poche en plastique. SOS à l'au-delà, je rumine comme un veau les questions que je me pose... Et si ce n'était pas ça mais autrement, je ferais bien de me dépêcher de ne pas trop faire de conneries. La vache, je vais me frapper la tête contre le mur. Je vais bien finir par les défoncer ces murs ! J'voudrais bien sortir de là. Une seule chose est sûre, j'suis bien là. J'ai la gueule contre le miroir. Y a des oiseaux qui s'agitent dans tous les sens. Y en a qui se posent sur les fils électriques de mes neurones. Décharge de dix-mille volts dans les dents. Aïe ! La question : je m'arrête avant le pont ou je franchis la rivière ? C'est mieux ici ou là-bas ? De toute façon, j'suis là et bien là. Trouver la force de traîner ce putain de corps, je ne me débarrasserai pas de mes quelques neurones. Facile à dire. Je crois avoir trouvé ma vocation. Je vais faire figurant dans les séries américaines.

  • Spleen V

    Il y a à dire l'inutilité de toute chose. Mais on ne peut pas se flinguer, on ne peut pas prendre ses vessies pour des lanternes. De toutes façons, où voulez-vous aller ? On a les pieds bien sur terre, on ne décolle pas d'une semelle. La société d'hyper-consommation nous ment, elle promet le bonheur en boîte de 500 grammes, elle nous vend du vent en sachet lyophilisé avec bon de réduction, elle envoie au paradis de l'emballage et de la marée noire avec effet rétroactif. Dans les magasins de porcelaine, j'ai la gueule d'un terroriste, cauchemar de la verrerie qui se casse sous les gestes d'un éléphant, embarqué par les CRS, jugé frappadingue et interné en quatrième vitesse. De toutes façons, on ne peut pas se flinguer, t'as signé mec, tu finis ta purée et ton dessert ! Il se pourrait que ça vienne assez vite, y a pas à être pressé, juste prêt, ça suffit. Je devrais faire de la philosophie, moi... je finirais agrégé, docteur certifié, etc. Ben, il se peut que la vie n'ait pas trop de sens, donc faut pas trop chercher midi à quatorze heures. C'est bien possible, ma chère madame, les slips à papa ont perdu de leur qualité en cinquante ans et avec le réchauffement climatique les caleçons ont rétréci de moitié. Va falloir faire attention aux poissons et aux baleines ! La société d'hyper-consommation nous vend de la dépression en bouteille. Le monde est pourri. Ca donne envie de se flinguer. Bon sang de bonsoir, j'ai pas la zen attitude, j'ai pas d'ambition dans les neurones, je suis pas concurrentiel du ciboulot ! Je sais plus où j'ai mis mon CV, où j'ai bien pu mettre mon CV ? Sapristi de bonsoir, où j'ai bien foutu mon cartable ? Où qu'il est passé mon bulletin de notes ? Un et un, deux ; deux et deux, quatre. Garde à vous ! Au pas, au pas ! J'attends la récréation pour fumer mon mégot... Il paraît qu'on peut plus fumer, ça fait mourir du cancer. La mort lente est là, dans l'ombre, elle attend. Pas à pas, le vampire se faufile en vous, il vous ausculte, soupèse votre âme. « - As-tu été sage ? As-tu bien travaillé ? » C'est con, la mort, ça vous emmène pour des raisons incompréhensibles, ça vous lâche au milieu du désert ou sur les trottoirs parmi les poubelles. Y a bien rien à y comprendre ! Les cours vont reprendre, je suis comme un con sur mon banc à disserter sur l'inutilité de chaque chose. Mais on ne peut pas se flinguer à dix-sept ans.