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  • Chaque homme est assassiné

    J'ai tourné dans tous les sens des pensées impossibles, je me suis tapé violemment la tête contre le mur, j'ai voulu en finir avec cette saleté d'écriture, pour laisser le vide, le calme... mais rien, il n'est pas de repos ici-bas, on est pas sur Terre pour foutre que dalle, faut bosser comme des charognes ! Qui a été le premier à s'élancer... le mot ou l'esprit ? Je veux dire : suis-je esclave des mots et puis-je briser mes chaînes ? De toutes façons, les deux, on expulse ! On peut pas en stocker là dans les neurones, faut que ça sorte, à tout prix, faut que ça circule, faut que ça bouge sur les murs de la caverne ! Alors, on ne peut pas ouvrir le gaz, faut continuer à marcher au garde-à-vous ! Quand y a plus de piles, quand les batteries sont à plat faut prendre ses jambes à son cou, faut dégager vite fait ! Faut racler au fond du cerveau, agiter les ombres. C'est que ça raconte des histoires impossibles, pas faciles à comprendre. Je pose mes mots sur le réel comme je peux, je me brûle les doigts sur les mots... les mots c'est pire que tout, ça vous consume de l'intérieur, ça vous découpe en morceaux ! Même à marcher sur la plage déserte, y a toujours les mots qui cognent aux carreaux ! Y a toujours des massacres, des tortures dans la tête ! Alors, on peut pas aller se réfugier à l'autre bout de la terre, faut pas croire au Père Noël et aux contes de fées ! Où que vous alliez soyez prêts à affronter vos propres mots ! Ca vous court après comme un chien et ça vous mord le cul ! Il convient de rester immobile, à l'affût, prêt à dégager au bon moment quand ça vous saute à la gorge ! On peut toujours écrire une histoire avec les mots et quand elle est finie, on peut toujours rajouter un chapitre, un autre cauchemar, un autre charnier. Alors, fermer sa gueule, en quelque sorte, c'est tout à fait égoïste, c'est même carrément impossible ! Y a trop de cons sur Terre, on peut pas s'en tirer comme ça ! Et puis à l'intérieur aussi, ça s'agite trop dans tous les sens ! Alors, j'estime ne pas avoir le droit de fermer ma gueule. Puisque j'ai reconnu l'écriture comme élément vital. Tout comme j'ai une carte Vitale qui me sert à la pharmacie, j'en ai une sous les doigts pour la santé de ma conscience. Je sais que l'exercice est sans fin. Il ne s'agit pas d'une activité comme une autre. Et c'est désespérant. Désespérant de courir après les mots. Désespérant de s'agiter pour tout, pour rien. Un mot est-il écrit qu'un autre, que mille autres se pressent ! Le repos même est volé, précaire, menacé par tous les synonymes, par tous les signes de la langue française ! Chaque expression est une rumination. Je suis une vache : je rumine ! Une vache dans le pré qui regarde passer les trains. Je m'en fous pour ma gueule ; le repos tout relatif est bien là. Mais je suis alerte, attentif puisque c'est la nature de l'homme depuis qu'il a découvert le feu. Des centaines de milliers d'années plus tard, l'homme n'est pas sorti de sa préhistoire. Il s'enfonce dans les ténèbres. Je suis et nous sommes un élément insignifiant de ce monde. Ce n'est pas une raison pour se taire, pour ne pas gueuler sa rage partout où il est possible de la gueuler. Alors, on découvrira que nous ne sommes que des photons. Oui, la poésie n'a pas d'avenir dans les mots. Elle n'a pas d'avenir dans une construction qui la tienne. Elle est un château de cartes dès lors qu'elle oublie qu'elle est née et qu'elle est fruit de l'impossible. Déchirez vos poèmes ! Postez-les comme des nuages de coton dans le ciel. Si on peut encore croire à la poésie. Si on peut croire à son pouvoir de transformation. Oui, nous ne sommes pas fruits du poème, mais fruits des famines et des massacres passés et à venir. Terribles conséquences sur les mots. Terribles conséquences sur l'esprit. Le poète est un homme. Pas plus avancé ni plus intelligent qu'un autre. Le poète se tient au pied de la tour de Babel, face à toutes ses contradictions, sommé par sa conscience d'effectuer toutes ses métamorphoses. L'esprit encaisse, mais c'est bon pour la gueule. Il est bon de voyager, de découvrir de nouveaux horizons. Je suppose qu'il n'y a pas de clef. Je suppose que les questions se posent à chacun. Qu'on voudrait tous dépasser notre propre horizon. Je suppose qu'il n'y a pas de méthode, seulement des choix qui se font à chaque instant de la vie. Si la poésie est un miroir de nous-mêmes, à nous d'en faire une arme. A nous de faire du poème la foudre qui déchirera le ciel. Voyez, je crois encore à la poésie ! Alléluia ! NGC 581 n'est peut-être pas mort ! Mardi soir sur Arte le documentaire Le cauchemar de Darwin sur la vie en Tanzanie au bord du Lac Victoria et la mondialisation. Je ne mangerai plus de Perche du Nil. Des images insoutenables - mais elles sont bien de ce monde - de têtes de poissons frites et séchées au soleil parmi les vers et la puanteur... On y travaille les pieds dans la boue. Les enfants sont en haillons et se battent pour une assiette de riz. Ils sniffent de la colle. Fument. Dorment dans la rue. Les avions viennent à vide ou amènent des armes et repartent en Europe avec les poissons. Pour gagner de l'argent, il faut en vendre beaucoup et ils sont de plus en plus rares. On souffre de famine. Parfois, il faut faire la guerre. Un article du dernier numéro de La Vie indique que 24 000 personnes meurent chaque jour des conséquences de la faim, dont 18 000 enfants. Il n'y a pas de mots pour ça. Il n'y a pas de mots pour décrire tant de choses qui se passent aujourd'hui ailleurs, dans les murs et aux portes de ce monde occidental.

    « M. JEAN ZIEGLER, Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, a indiqué que malgré les nombreuses promesses faites pour éradiquer la faim lors du Sommet mondial de l'alimentation en 1996, le nombre de personnes souffrant de la faim ne cesse d'augmenter. Aujourd'hui, 852 millions de personnes souffrent de la faim, 24 000 personnes meurent de faim chaque jour, un enfant meurt de faim toutes les cinq secondes et six millions d'entre eux n'atteindront jamais l'âge de cinq ans.  Cela dit, la planète produit de quoi nourrir tous les habitants de la planète et pourrait même nourrir 12 milliards de personnes.  La faim et la famine constituent donc une violation des droits de l'homme, a estimé M. Ziegler. Chaque homme qui meurt de faim aujourd'hui meurt assassiné, a-t-il dit. » Assemblée générale des Nations-Unies 25 octobre 2006.

  • Epilogue

    Lundi soir sur Arte le film Shooting dogs. L'ONU estime que le génocide rwandais contre les Tutsi a fait plus de 800 000 morts entre avril et juillet 1994. Ce fait monstrueux et le suicide de Kurt Cobain le 5 avril 1994 se sont passés alors que j'étais interné en hôpital psychiatrique. Le film, basé sur des faits réels, montre comment des centaines de réfugiés Tutsi ont été exterminés par les Hutu après que les forces armées de l'ONU se soient retirées de l'école qui offrait à des milliers de personnes une sécurité relative. En droit, on appelle cela non assistance à personne en danger, en politique internationale on appelle cela un mandat. Au même moment, on inventait le « droit d'ingérence », une notion floue qui n'a pas permis d'éviter le massacre. Bien des années auparavant, les survivants d'une boucherie effroyable avaient lancé cette parole raisonnable : « Plus jamais ça. » Il faut croire que l'Histoire se répète et que nous ne sommes que des pions sur un échiquier hypocrite qui s'achète une bonne conscience quand les tueries se déroulent ailleurs. Cette nuit de mars 1994, j'étais enfermé dans une chambre close, le matelas par terre. Mais ce n'était pas moi qui étais enfermé ; c'était l'humanité toute entière qui sombrait dans la folie des hommes, c'était le génocide même qui se préparait entre ces quatre murs. Dans le couloir, il y avait des cris. Mais ce n'était pas ceux d'un homme, c'était les cris désespérés de ceux qui fuyaient les machettes. C'était les sanglots, les hurlements des femmes violées et assassinées. Sous les yeux impuissants des bien-portants, ignoré par tant de malades, le génocide. Il y a des événements avec lesquels on doit régler certains comptes. Et l'écriture est une façon de tirer les bilans d'une histoire. Les conflits, les guerres, les incompréhensions entre les individus et les peuples sont des éléments universels présents insidieusement en nous. L'homme est capable de choses monstrueuses. Je ne suis pas comme le père Christopher qui face à l'ennemi ne ressent que de l'Amour. Mais je sais tout le prix de cet amour, pour l'avoir trop souvent mis à l'épreuve. Alors, les yeux face à la lumière, face aux éclats des bombes, il convient d'être lucide. Puisque parler de soi c'est aussi et surtout s'inscrire dans l'histoire tragique de tous les hommes ! Des années après, j'estime être rendu au bout de ce que j'aurais voulu dire. Sans avoir épuisé tous les sujets, après être passé de l'un à l'autre, j'ai tout de même essayé de donner du sens à certaines choses en moi. Comment exprimer quelque chose d'infini dans le corps fini du texte ? Puisqu'il s'agissait de faire un parcours et non de le ponctuer par les mots. Et c'est bien cet itinéraire en nous qui importe ! Laissons Kurt Cobain dans sa tombe. Gardons en mémoire les morts du génocide rwandais et ceux de tous les génocides. Je suis sorti de l'hôpital. J'ai en mémoire les ombres des cavernes. Fin de l'histoire ici. Fin de l'épisode. NGC 581 est peut-être arrivé à son terme, avant autre chose, ailleurs.

  • Prix d'édition ville de Dijon 2009

    L’Association Les Poètes de l’Amitié organise le prix d’édition poétique de la Ville de Dijon. La participation est gratuite et consiste à adresser un manuscrit en 6 exemplaires et en langue française de 48 à 56 pages. Le manuscrit primé est publié gratuitement en 500 exemplaires (150 remis au lauréat). Pour cette édition 2009, les envois seront réceptionnés jusqu’au 30 septembre 2008. REMISE DU PRIX DANS LE CADRE DU PRINTEMPS DES POETES EN MARS 2009. On peut se procurer un exemplaire du dernier Prix, Il y avait un homme ( recueil de 56 pages, format 21x21) , de Jacques Thomassaint. Tous les renseignements à cette adresse : http://des-passantes.over-blog.com/article-5794008.html